lundi 29 août 2016

Face au spectre « De-risking », le secteur privé attend des actions concrètes…


Des représentants des pouvoirs publics et du secteur privé des affaires, sans forcer sur les traits, ont évoqué les conséquences économiques et sociales désastreuses du « de-risking » et surtout l’urgence d’une action rapide et concertée pour éviter ce choc à Haïti, au cours d’une réunion tenue au centre de convention de la BRH, le vendredi 26 août 2016. Après la prise de conscience, il faut les actions. « Le banquier est satisfait de la tenue de cette réunion et attend les retombées, à commencer par la réunion promise pour mardi. A ce moment-là, on verra l’agenda et les progrès », a confié tout de go au journal Claude Pierre-Louis, le directeur général de la Sogebank. « Le pays ne peut risquer cette catastrophe », a-t-il insisté, soulignant que le « de-risking », outre l’impact sur les transferts d’argent, peut avoir des « impacts sociaux importants ». « Le gouverneur l’a dit, cela peut avoir des impacts sur l’emploi », a indiqué Claude Pierre-Louis, qui a salué la tenue de cette rencontre.

Pour une économie qui importe entre 65 et 70 % des ses produits de consommation de masse, il faut craindre plus qu’une pénurie, a évoqué Eddy Deeb, l’un des responsables du groupe Deka International, vendeur, entre autres, des produits Bongu. Si le pays est frappé par le « de-risking », il n’y aura pas seulement le « risque de pénurie » et « d’inflation ». « Il faudra craindre une révolte sociale, de grands troubles. C’est un problème sérieux qu’il faut prendre au sérieux », a appelé Eddy Deeb, satisfait que le Parlement et les autres pouvoirs de l’Etat comprennent la nécessité d’agir vite.

« Si tout marche bien, c’est un problème qui sera résolu d’ici deux semaines », a estimé Carl Braun, P.D.G. de la Unibank. « Je crois que la BRH et le secteur financier sont prêts à aller de l’avant pour en finir avec ce dossier », a-t-il dit avant de revenir sur les mesures à prendre. A pas de course, et avant la première semaine de septembre, il faut que le Parlement vote la loi d’application de l’UCREF, la loi modifiant la loi de 2013 sur le blanchiment des avoirs et le financement du terrorisme et qu’on abroge le décret créant le centre financier international de La Gonâve, a détaillé Carl Braun, qui dit être de « nature stratégiquement optimiste » et « tactiquement pessimiste ». « Par rapport à nos intérêts nationaux, il faut rester inquiets jusqu’à ce que le problème soit résolu », croit-t-il, estimant que le momentum doit être saisi pour faire prendre d’autres mesures de conformité afin de réduire le niveau de risque associé au pays. « Il faut garder ce momentum pour ne pas être en retard dans le futur », a conseillé Carl Braun.

BUH, satisfaite, apaisée ? « Nous sommes prudent. Pas d’optimisme béat. Il faut être réaliste. Il s’agit maintenant de respecter les engagements pris », a estimé le directeur général de la BUH, Mackensen Gomez.

Olivier Barreau, P.D.G. de Alternative Insurance Company (Aic) a souligné que les compagnies d’assurance étaient aussi concernées par le « de-risking ». Elles travaillent en étroite collaboration avec les banques. Des compagnies d’assurance font également des placements. La traçabilité et la transparence sont imposables à tout le monde, a expliqué Olivier Barreau, convaincu que le nécessaire sera fait pour écarter la coupe amère « de-risking » des lèvres de l’économie haïtienne. « Je crois que tout le monde a bien compris l’importance de la menace qui pèse sur nous en tant que nation et les coûts économiques et sociaux si nous n’arrivons pas à nous mettre à jour », a-t-il dit, satisfait de la tenue de cette rencontre.

Pour l’industriel André Apaid, cette rencontre est très importante parce qu’elle a mis sur le tapis l’impact économique probable du « de-risking ». Sur le secteur de la sous-traitance textile qui fournit plus de 40 000 emplois, représente presque un milliard de dollars d’exportation pour le pays, le spectre de cessation de correspondance bancaire fait très peur. Les donneurs d’ordre effectuent des transferts d’argent pour payer les ouvriers, a expliqué André Apaid. Pour des investisseurs du secteur privé, dont les Apaid, qui vont investir plus de 200 millions de dollars dans des zones franches, la situation est préoccupante. « Nous avons une boule dans la gorge quand nous entendons un risque pareil », a-t-il dit. « Il est important que les autorités s’entendent pour agir rapidement afin de protéger la croissance de ce secteur et de tous les secteurs de l’économie du pays », a appelé André Apaid, estimant que son secteur « très prometteur », à ce carrefour, est comme un levier, une locomotive pour l’économie.

Le ministre de la Justice, Me Camille Junior Edouard, a confié avoir pris acte de l’appel à abroger le décret sur le centre financier international de La Gonâve. « Au niveau de l’exécutif, nous sommes touchés par cette question et nous réagirons sous peu », a-t-il dit en marge de la rencontre au cours de laquelle le président du Sénat, Ronald Larêche, les députés Jerry Tardieu, et Price Cyprien ont fait état de la volonté du Parlement de faire ce qu’il faut et au plus vite face au spectre grimaçant du « de-risking ».

Source: Le nouvelliste

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