En 1974 Richard Nixon démissionne de la présidence des États Unis, craignant sa destitution. Son crime : espionnage du Parti Démocrate. C’est le fameux scandale du Watergate avec lequel les américains baptisent maintenant presque tous leurs scandales. Bridgegate, Monicagate, Deflategate, Emailsgate, Irangate, Spygate, etc…
En 2016 le Parti Démocrate est de nouveau victime d’espionnage. Par voie électronique. Cela semble avantager un autre républicain: Donald Trump. Les courriels piratés, divulgués par Wikileaks visent à embarrasser Hillary Clinton et ses partisans. Dans un des lots de courriels on peut même trouver l’adresse courriel privée du président Barack Obama avant son accession à la Maison Blanche. Le compte courriel du chef de campagne de Clinton, John Podesta, est impitoyablement piraté, et Wikileaks prend un malin plaisir à relâcher des milliers de ses courriels. A retardement. Ce piratage vise le pays et les démocrates qui sont sur des charbons ardents, ne sachant si Wikileaks est en possession d’autres courriels compromettants. Ces courriels en possession de Wikileaks semblent être le seul facteur x qui pourrait sombrer la candidature de Clinton qui a le vent en poupe. La campagne de Trump est apparemment mortellement blessée par des scandales sexuels et par sa mégalomanie.
Quant il s’agit de la distribution des résultats du piratage électronique, Wikileaks occupe une place de choix dans un champ qui devient saturé de hackers constamment sur pied de guerre et qui fouinent partout. Personne, aucun gouvernement ne sont à l’abri. Les services tels que Twitter, Spotify, les sites web comme CNN ont été la proie des hackers aujourdh’hui même 21 octobre.
L’australien Julian Assange fonde Wikileaks en 2006. Il est pour longtemps considéré comme le Robin Hood du piratage. Mais on finit par faire de lui un paria. Accusé de viol en Suède et recherché pour questionnement, il se réfugie à l’ambassade d’Équateur à Londres craignant que la Suède ne l’extrade vers les États Unis, le pays le plus frappé par ses révélations. Assange est virtuellement en prison à l’ambassade et ne peut s’aventurer au dehors même pour une promenade, au risque d’être appréhendé par la police britannique.
Les informations en provenance de Wikileaks révèlent dans beaucoup de cas le cynisme de Washington et la méchanceté de bon nombre de ses officiels. Les Haïtiens sauront par exemple le rôle qu’a joué l’ambassadeur des États Unis Kenneth Merten dans l’élection de 2010 et comment il a bousculé René Préval qui voulait augmenter le salaire minimum des travailleurs des manufactures pour finalement les forcer à accepter moins de deux dollars par jour. Les Haïtiens sauront la participation d’Hillary, à l’époque secrétaire d’État et de son employée Sheryl Mills, ce qui a rendu la candidate vulnérable aux attaques de Donald Trump.
Mais récemment l’agence Wikileaks semble avoir été exploitée par les Russes. Poutine voit dans Trump une proie facile qu’il peut manipuler à volonté. Il a donc grand intérêt qu’il l’emporte sur Clinton. Il entreprend donc, selon les agences de sécurité des États Unis, d’influencer la campagne par le biais de Wikileaks. Ces agences de sécurité affirment que le piratage du compte de Podesta porte la signature des actes de piratage perpétrés par le passé par le Kremlin. Trump semble jouer le jeu de Poutine en manifestant sa sympathie pour l’ancien patron du KGB et va jusqu’à lui demander de pirater les serveurs courriels de Clinton au grand dam du gouvernement américain. Cette demande du candidat républicain est d’une naïveté extrême.
Les Russes ont certainement la capacité de ce cyberpiratage. Leurs développeurs sont parmi les meilleurs au monde. En 2015, je chronique dans mon ouvrage Été Hexagonal la suprématie de leurs jeunes développeurs dans la coupe du monde de programmation entre les meilleures universités du monde à Marrakech, Maroc. Je suis l’un des surveillants à la compétition. Ils gagnent la compétition haut la main en y établissant le record d’être les seuls à avoir résolu tous les problèmes au cours des trente neuf ans d’existence de la coupe. Les Russes y ont établi leur hégémonie en la gagnant 5 fois au cours de la dernière décennie. Des éléments aussi brillants sont les premiers à être engagés dans la mission délicate de la pénétration et de l’intrusion dans les systèmes informatiques les mieux protégés. Dans les forteresses cybernétiques les mieux gardées. Ce sont des jeunes avec une capacité élevée de concentration qui les habilitent à se pencher longuememt sur des puzzles les plus complexes. Les jeunes gagnants ont un trait qui les distingue des autres compétiteurs, ils ne se présentent pas aux fêtes et autres moments d’amusement et de détente avec les autres compétiteurs dans les jours précédant la compétition préférant s’adonner exclusivement à leur préparation en avalant des problèmes et des algorithmes. Des hermites qui ont le tempérament, la patience, et l’intelligence à solutionner des problèmes logiciels les plus ardus, aptes à donner des sueurs froides aux administrateurs des systèmes logiciels du monde.
La Russie semble être l’un des rares pays à vouloir bénéficier d’une présidence éventuelle de Donald Trump et beaucoup de leaders du monde manifestent en public ou en privé leur aversion au milliardaire. Même l’Équateur qui en 2012 accueille Assange en libérateur est irrité par l’immixtion de ce dernier dans l’élection Américaine. L’Équateur interrompt le service Internet d’Assange pour lui envoyer un signal subtil qu’il n’est plus un invité d’honneur à l’ambassade. Cette irruption n’empêche pas à Wikileaks de faire la livraison de ces courriels que remuent le couteau dans la plaie des démocrates. L’organisation y avait pensé. Un plan de secours est rapidement actionné.
Wikileaks qui avait débuté ses fuites comme un exemple probant de la défense des petits contre l’agression des super puissances en dévoilant leurs manigances écœurantes au détriment des états faibles, s’est laissé instrumentaliser par les Russes et en ce faisant est en passe de perdre son impartialité. Les comptes courriels de Trump n’ont pas été piratés. L’organisation s’en prend uniquement aux démocrates dans l’élection.
Les Haïtiens ont particulièrement été stupéfaits d’apprendre les actions des États Unis à leur endroit grâce aux révélations de Wikileaks. Si les enjeux n’étaient pas si gargantuesques dans les élections américaines il aurait été amusant de voir comment un pays qui manipule les élections des autres réagit quand ses propres élections sont manipulées. En constatant que l’élection lui file quasi irrémédiablement entre les doigts, Donald Trump crie haut et fort au truquage. Cela porte l’OEA à venir déployer pour la première fois des équipes d’observateurs des élections aux États Unis.
Il n’est pas sûr si Assange révélera des informations si explosives qu’elles bouleversent les élections. Il se peut que l’objectif de l’australien soit simplement de faire perspirer les autorités Étasuniennes ou, qui sait, négocier même une sortie de geôle. On l’espère mais Il n’est que d’attendre, à moins de trois semaines du 8 novembre 2016.
Marc-Arthur Pierre-Louis