mercredi 23 août 2017

Une nouvelle opposition pour Haïti!

Une opposition moderne est une bouffée d'oxygène pour la démocratie en Haïti.

 Une opposition démocratique, autrement dit, une classe politique démocratique, fait partie de ce dont Haïti a immensément besoin. Une opposition n'est utile que si elle se donne les moyens pour jouer son rôle en forçant le gouvernement à expliquer et justifier de manière claire ses choix, en matière de politique publique, et d'assumer ses choix (1). Avant tout, l'opposition est appelée à jouer un rôle fondamental de contre-pouvoir. Elle est là pour empêcher au pouvoir de mener une politique qui, manifestement porte atteinte aux libertés et aux droits fondamentaux des citoyens. De même, l'existence d'une vraie opposition est garantie pour le pluralisme politique. Elle aide donc à dynamiser le système démocratique. C'est aussi l'opposition qui favorise le renouvellement du personnel politique d'un pays.

 Cependant, une opposition qui n'est pas en mesure d'assumer ce minimum risque souvent de renforcer le gouvernement même dans ses prises de décision, parfois, les plus défavorables aux intérêts du pays. Peu importe la situation, il faut une opposition. En réalité, il ne peut exister de communauté politique sans une opposition composée de femmes et d'hommes éclairés capables de motiver les citoyens sur les vrais problèmes du pays, les causes qui les engendrent et les choix à faire en vue de les résoudre dans l'intérêt commun.

Une opposition peut-être faible, comme c'est souvent le cas en Haïti. Cependant, ce n'est pas une raison suffisante pour le pouvoir de la minimiser, de la discréditer ou de l'ignorer... Dans un système démocratique, une opposition faible ne fait pas toujours nécessairement l'affaire du pouvoir même si celui-ci n'a pas non plus à l'épauler. C'est de bonne guerre. On ne fait pas de cadeau en politique. Il arrive aussi d'avoir une opposition et un pouvoir faibles.

Le drame de l'opposition haïtienne, en fait, de toute la classe politique, c'est sans doute sa difficulté à se moderniser, s'organiser, se structurer et surtout à se démocratiser pour assurer l'alternance et servir de véritable alternative. Il doit s'agir d'une opposition qui critique, dénonce, mais qui propose aussi. Tout ne peut et ne doit se résumer indéfiniment à la mobilisation des rues. La mobilisation populaire est un outil de combat démocratique. Elle peut être plus efficace quand elle est utilisée de manière plus rationnelle et quasiment en dernier ressort. Dans une bataille politique, il y a certainement des étapes à franchir. Si les actes politiques ne sont pas mûrement réfléchis, ils risquent, parfois, de tourner en faveur de l'adversaire. Car, l'effort de modernisation doit commencer là. Le jeu de l'alternance doit se pratiquer au sein même des partis. La direction des partis doivent se renouveler régulièrement de manière démocratique. 

Si cette culture démocratique ne se pratique pas au sein des partis politiques, ces structures risquent de disparaître et suivre leurs leaders inamovibles dans leurs tombes. Les partis politiques doivent fonctionner comme véritables institutions. Les militants et les cadres doivent pouvoir aspirer, légitimement, à accéder à la plus haute instance dirigeante du parti. C'est avant leur parti. C'est ceux tous qui forment le parti. Ce n'est pas l'affaire d'un ou de quelques individus.

L'exercice démocratique est peut-être douloureux, mais cela vaut la peine de le cultiver. Personne n'est né avec une culture quelconque, mais on peut l'apprendre. La démocratie est une œuvre de construction permanente. Elle se fait pierre par pierre et jour après jour. C'est le défi que la classe politique haïtienne doit relever aujourd'hui. 

L'opposition doit aussi s'approprier des outils de communication modernes. Elle doit pouvoir se servir des nouvelles technologies de l'information pour mieux faire connaître son projet politique. Aussi, est-il impératif de soigner sa communication pour mieux se projeter dans l'opinion publique. Elle doit, dans ses actes, prioriser la transparence. C'est bon pour la santé démocratique d'un pays. 

FRANCKLYN BIEN-AIMÉ GEFFRARD 

Références: 
[1] Dahl R. A., Political oppositions in western democracies, New Haven, CT, Yale University, presse, 1996.

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