20 ans après avoir été votée via la Constitution de 1987, la Décentralisation reste un voeu pieux qui peine à trouver la voie de la matérialisation dans la réalité politique haïtienne. Face à la lenteur du pouvoir public vis-à-vis de cette situation, le GRIDE a décidé de donner le ton en publiant un document de vulgarisation des concepts clés de la décentralisation, la voie obligée vers le développement durable.
Le Groupe de Recherche et d\'Intervention en Développement et en Education (GRIDE) vient de publier le premier tome du document intitulé « Comprendre la charte des Collectivités Territoriales », sous la plume du professeur André Lafontant Joseph. Ce manuel de douze chapitres répartis sur 159 pages est conçu à partir du Décret-cadre de la Décentralisation qui fixe les grandes orientations du processus.
« La Charte des Collectivités territoriales est cet ensemble de 5 décrets adoptés par le gouvernement de transition Alexandre/Latortue, le 1er février 2006 et publié au journal officiel Le Moniteur le 14 juin de la même année. Ces 5 décrets portent respectivement sur le cadre général de la décentralisation, l'organisation et le fonctionnement des sections communales, des communes, des départements et enfin sur la fonction publique territoriale, c'est-à-dire le statut des fonctionnaires des Collectivités », lit-on dans le premier chapitre de cet ouvrage, préfacé par l'agronome Joël Ducasse.
Selon l'auteur, André Lafontant Joseph, trois raisons fondamentales expliquent la nécessité de cette nouvelle publication du GRIDE. Il s'agit :
- de la réalisation des élections locales directes en décembre 2006 et la nécessité de poursuivre avec les élections indirectes au début de l'année 2007 ;
- du déficit de publicité ayant caractérisé la publication par le journal officiel Le Moniteur des cinq décrets constituant le Décret-cadre de la Décentralisation ;
- de la menace faite par le Premier ministre Jacques-Edouard Alexis de mettre ces décrets en veilleuse.
Beaucoup de temps, peu d'effets pratiques
20 ans séparent le vote de la Constitution de 1987 de la parution du livre du professeur André Lafontant Joseph. « Sur cette période, indique Joël Ducasse, les Assemblée communales n'ont jamais été fonctionnelles et la centralisation des ressources budgétaires a continué de plus belle...Les élections locales qui devaient précéder les élections parlementaires et présidentielle, suivant le voeu convergent de la société civile, du gouvernement de transition, des partis politiques, du CEP et de la communauté internationale, ont été décalées de dix-huit mois, reléguées sur la fin et réalisées avec ennui. »
Longtemps réclamée par plusieurs secteurs de la population haïtienne et proclamée depuis 1987 par la dernière Constitution, la Décentralisation tarde à se traduire dans l'applicabilité, vingt ans après sa reconnaissance officielle par la Loi mère haïtienne. Les faibles contributions des différents gouvernements qui se sont succédé à la magistrature suprême de l'Etat de 1987 à nos jours, n'ont même pas permis de jeter les bases pour faciliter la prise en main des collectivités territoriales par les pouvoirs locaux.
Entre-temps, la centralisation et ses corollaires continuent d\'entretenir le pays dans un état de sous-développement chronique.
Certains chiffres avancés par l\'agronome Joël Ducasse dans la préface de ce document, témoignent de la nécessité de combattre la centralisation. En effet, dit le préfacier : En 1995, seulement 1,7% du budget national était affecté aux Collectivités Territoriales qui ont, par ailleurs, la charge de fournir les services de base à sept millions d\'habitants. Alors qu'en Amérique du Nord (USA et Canada) les pouvoirs locaux gèrent 45% du budget. Pour le reste de l'Amérique du Nord, la moyenne est de 29%.
Ce livre d'André Lafontant Joseph, qui se veut un document de vulgarisation et d\'analyse de la Charte des Collectivités Territoriales, constitue un pas vers la réalisation effective du processus de décentralisation de l\'appareil d'Etat. C'est également une fenêtre ouverte sur le développement où chacun y trouve son compte, qu'il s'agisse du Parlement, des élus locaux ou de la société civile.
Cyprien L. Gary
Le nouvelliste
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